L'avant-midi appartient à ceux qui se lèvent tôt
  • Blog
  • Citations
  • À relire
  • Services informatiques
  • Contact
  • Accueil

Le 5e

12/7/2017

0 Commentaires

 
À peu près à cette heure-ci demain, ma vengeresse, seconde du même nom, coupera la nuit en deux, fidèlement, pour m’amener vers l’est, tout en douceur, pour commémorer simplement le décès de mon père voilà déjà 5 ans. Chaque année, depuis ce vendredi 13 juillet 2012, à l’heure où il s’éteignait dans mes bras au Centre Hospitalier de Matane, sur le coup de 6h35, je retourne au cimetière à ce moment précis comme pour marquer encore une fois la trace qu’il a laissée en moi, et qui ne s’effacera pas, même si je le voulais.

…

Je relis ce texte écrit en vitesse dans un stationnement sur la route vers Québec, peu de temps après son décès, et je garde encore le même sentiment (
Il est parti...).

…

Évidemment, je n’aime pas les grandes cérémonies, plusieurs le savent. Mon recueillement est simple, voire intérieur. La distance à parcourir pour rejoindre son lieu de repos me donne amplement le temps de ressasser bien des souvenirs. Tôt le matin, Maman m’accompagne et nous restons là, face au granite dur et froid, comme si nous attendions que la mort nous donne signe de vie !

​Le deuil est complété pour moi maintenant. La boucle est bouclée. J’ai fait un tour complet. Et je suis en paix avec l’avant et l’après le passage de mon père dans ma vie. Sa mort a coïncidé avec quelques décisions importantes qui ont été maintenues depuis et qui marqueront le reste de mon existence. Il ne peut plus en être autrement …

« 
Pendant que je dormais, pendant que je rêvais, les aiguilles ont tourné … il est trop tard. Mon enfance est si loin, il est déjà demain. Passe, passe le temps, il n'y en a plus pour très longtemps. » (Il est trop tard – Georges Moustaki)
0 Commentaires

Un violon de mon père

9/6/2015

0 Commentaires

 
Vendredi, sans trop savoir pourquoi, même en me posant la question à plusieurs reprises, j’ai annoncé ouvertement que j’aimerais aller « voir » mon père … Je sais, n’étant fou qu’à temps partiel, qu’il était décédé le 13 juillet 2012. C’est ma façon à moi de me retrouver, de refaire le point en me recueillant au-dessus de l’endroit où il repose désormais, bien souvent en tournant en rond, seul, marchant en silence près de l’endroit où il a été inhumé, ou même en m’assoyant carrément sur sa pierre tombale. C’est une manière comme une autre de compléter le cycle de mon deuil …

Les mots ne sortent pas de ma bouche, pas plus qu’ils ne sont produits en mon for intérieur, car, pour moi, les morts sont morts et il n’y a plus de réseau pour les joindre. Le seul que j’arrive à rejoindre dans ces instants de recueillement et de tranquillité, c’est moi et moi seul. Et c’est déjà assez compliqué comme ça, je vous l’avoue …

Ainsi, vendredi, au moment où j’exprimais le besoin de « voir » mon père, n’ayant nullement l’envie de me taper les quelque 800 kilomètres aller-retour qui me séparent du lieu de son inhumation, au même instant, ou presque, une personne, un homme, que je ne connais pas, prenait l’étui contenant son instrument de musique préféré, en quittant la répétition avec son groupe musical, ne se doutant que celui-ci n’était pas correctement fermé. Et ce qui devait se produire se produisit. Le loquet ouvert ne sut retenir le violon qui chuta pour atterrir sur le plancher, au grand désarroi de son propriétaire.

Ce violon porte la signature de mon père … je l’ai appris aujourd’hui, mardi …

Cet homme m’a contacté grâce à certains articles placés sur mon blogue, alors que la curiosité l’avait amené, voilà quelques années, à s’interroger sur la provenance de son instrument. Mon père, qu’il ne semble pas connaitre personnellement, inscrit toujours quelques données au creux du « ventre » de ses créations, entre autres, son nom et le numéro du violon lui-même, c’est-à-dire son rang.

Le violon a subi quelques dommages lors de la chute, une fissure au niveau de la table d’harmonie, et son propriétaire tient à le faire remettre en état le plus rapidement possible. Les propos qu’il tient lorsqu’il parle de son violon, le violon de mon père, m’ont beaucoup touché, et je souhaite pouvoir l’aider dans ses recherches.

Ne croyez pas que j’associe les deux évènements qui se sont déroulés ce vendredi presque simultanément. Ce n’est qu’une amorce pour ce billet de blog, sans plus. Cependant, j’ai toujours eu beaucoup de respect pour le travail de luthier de mon père qui a « mis au monde » plus de 70 violons d’excellente qualité, et je n’ai que très peu de renseignements sur ce qu’ils sont devenus. Pour moi, c’est lui qui les fabriquait et les faisait vibrer à mes oreilles la plupart du temps.

J’aimerais entendre, j’aimerais voir naitre des sons, voir courir des sonorités sur les cordes d’un violon que Papa a construit de ses propres mains avec tant d’énergie alors qu’un autre artiste en a fait sienne la texture et l’harmonie ! Aurais-je ce privilège ? À suivre …
0 Commentaires

Apprendre encore un peu plus de la mort

12/9/2014

0 Commentaires

 
Photo
Sans que personne ne s’en aperçoive aujourd’hui, je me suis rapproché de la mort, de la mienne en tout cas. Et sans le dire, car ça n’est pas très bien vu, plusieurs pensent même que cela relève du négativisme, je consume ma vie un peu plus chaque jour depuis que je suis né, en cachette, sans trop savoir combien il m’en reste en banque, sans connaitre la teneur de mon crédit. Je crois même que bien des personnes qui vivent autour de moi ne savent pas qu’ils subissent ce phénomène autant que moi depuis leur propre naissance … et elles semblent surprises, en atteignant un certain âge, que la mort commence à les rattraper.

Inutile de rallonger nos pas à la fin de notre vie pour éviter qu’elle nous rattrape, car l’aboutissement est inévitable. C’est tout au cours de notre séjour, autant vous que moi, qu’il faut régulariser nos pas pour que la marche en soit une paisible et heureuse… et encore là, chacun développe sa propre définition de la paix et du bonheur.

Photo
J’ai vu mourir mon père, je lui ai fermé les yeux, j’ai senti son pouls jusqu’au dernier écoulement de l’air dans ses poumons, jusqu’à ce que des sursauts de vie lui ouvrent ce grand bleu vif qui avaient orné ses yeux toute sa vie, et au cours des dernières heures que j’ai vécues à ses côtés, alors que son être n’était qu’un long silence étendu dans un lit de mourant avec quelques souffles d’un père dont les perles définitives de la vie s’égrenaient sous mes yeux, je mesurais le fait que la mort commence dès la naissance, sans que nous le sachions vraiment. Les années ont passé depuis, et j’ai épuisé encore quelques jours de mon crédit de vie, mais je n’oublierai jamais ce que j’ai expérimenté lors de ces importants moments.

Dans la lourde tristesse qui m’entourait, qui envahissait la chambre d’hôpital de solitude pesante, pesante mais combien apaisante, je comprenais que la perte de mon père pouvait devenir un gain, un gain de connaissances, comme un legs qu’il me faisait. J’avais discuté avec lui à plusieurs reprises au cours des dix-huit mois précédents ces instants terminaux de cette mort qui s’approchait, jour après jour. Il était plutôt discret là-dessus. Il en parlait peu. Il gardait ses distances face à cette noirceur qu’il pressentait devant lui, devant ce vide un peu effrayant, face à cette profondeur inconnue. J’avais essayé de l’amener à s’ouvrir un peu, un peu plus, sans trop réussir. Il m’écoutait, je dirais, puis il refermait ses yeux, comme si ceux-ci avaient été aussi ses oreilles. Peu de gens connaissent cette manière que mon père employait pour couper les ponts face à des sujets trop difficiles à aborder …

Seul avec lui, sur le bord de son lit, alors qu’il était encore à la maison familiale, je me souviens avoir distinctement ouvert ce dossier dont je parle ici, à savoir que nous commençons à consommer nos crédits de vie dès la naissance en nous rapprochant chaque jour un peu plus de la mort. Il était calme. Le courant passait bien entre nous, ce qui, dans nos vies respectives, n’avait pas toujours été le cas, Lui dont le cancer était annoncé, il le savait, et inopérable, et dont les métastases gagnaient de plus en plus de terrain, lui, il la voyait bien venir la mort. C’est de cette façon qu’il le disait, elle s’en venait. Ce que je dis ici, c’est qu’elle nous accompagne tout au long de notre vie, retirant nos jetons jour après jour, mais nous sommes plus souvent qu’autrement totalement incapables de l’apprivoiser. Ce qui fait qu’elle nous surprend lorsqu’elle nous « frappe », dans un premier temps, et qu’il est négatif d’en parler, dans un second temps.

La perte de mon père a été un évènement triste à quelques égards, et j’ai été bouleversé à bien d’autres égards, et je le suis encore. Ce qui me perturbe n’a pas grand-chose à voir avec la disparition de mon père car il me semble relativement normal de terminer sa vie à l’âge de 85 ans. Non, ce qui me turlupine, ce sont les leçons apprises, tirées de tout ce qui a entouré sa mort et ma relation avec lui lors de sa fin de vie …

Nous en reparlerons … peut-être … si vous êtes encore de fidèles lecteurs …

P.S. Maman, qui a 82 ans aujourd'hui, le 12, se porte fort bien … Une autre étape de sa vie a été entamée et bien assumée. Femme forte et douce à la fois, elle vit une belle vieillesse sans soucis …

0 Commentaires

Un peu tous les jours

13/7/2014

 
Note préliminaire, mais écrite après coup : Au moment où je publie ces lignes sur mon blog, je me prépare à prendre la route vers Matane, fendant la nuit en douceur comme je l’ai fait l’an dernier à la même époque. Ce rituel, que je trouve un peu niais parfois, me semble faire partie intégrante du processus de mon deuil personnel. Je le fais sans trop savoir pourquoi. Tout comme l’an dernier, je tiens à être sur la tombe de mon père à l’heure même où il est décédé voilà maintenant deux ans. Il était 6h35, le 13 juillet 2012, j’étais seul avec lui … Je n’ai rien promis, ni à lui-même, ni à moi-même, ni à sa mémoire, et je ne lui demande rien, mais … malgré les quatre cents kilomètres et plus qui me séparent de l’endroit où il est enterré, je me sens obligé, encore cette année, de m’y rendre à ce moment précis … L’an prochain, je verrai si le besoin est encore là …
Photo
Mon père est décédé d’un cancer de la prostate il y a deux ans déjà, c’était au matin du vendredi 13 juillet 2012, et pourtant, je le perds un peu tous les jours depuis ce temps …

C’est le sentiment qui m’habite aujourd’hui et je pense que c’est de cette manière-là que le deuil s’effectue en moi, sur moi et autour de moi, quotidiennement. Je n’étais pas près de mon père, comme on l’entend habituellement. Ma relation avec lui a souventefois été tendue, voire foudroyante, remplie de moments où les impulsions et la force caractérielle qui nous prouvaient à l’un et à l’autre que nous étions bel et bien père et fils teintaient fortement les voies que nous empruntions. Mais, dans les derniers mois de sa vie, les dix-huit derniers mois je dirais, quelques gouttes d’eau fraiche sont venues adoucir le vin de nos propos et il me semble que nous avons pu entrer en contact tous les deux comme peu de fois nous avions pu le faire auparavant, même lorsque nous évoluions côte à côte sur une même scène artistique.

Je garde profondément imprégné en moi, comme gravé dans le matériau même de ma propre structure d’homme, les derniers instants, les tout derniers silences extrêmement bruyants, si je puis dire, qui ont précédé son décès à l’hôpital de Matane, alors que j’étais la seule main qui lui tenait encore le poignet, l’unique oreille qui guettait encore ses moindres soupirs et les seules cordes vocales qui lui émettaient encore des messages à entendre. Me percevait-il ? Je n’en sais rien … Personne ne le sait avec certitude.

Je ne peux oublier tout ce bleu que ses yeux ont fait jaillir une dernière fois avant la chute finale vers l’au-delà; je l’ai reçu « longtemps, longtemps », et j’ai bien pris toute la mesure de ce qui m’arrivait avant de lui refermer les yeux à jamais, en n’oubliant pas de lui souhaiter, haut et fort, un bon voyage. Un fils ne voit mourir son père qu’une seule fois ! Et c’est un grand privilège que je me suis vu accordé, j’en suis bien conscient.

Encore aujourd’hui, j’ai peine à comprendre pour quelle raison je fus le seul de ses huit enfants à être à son chevet ce matin-là. Toute la nuit j’ai senti que la vie le quittait, les signes vitaux ne mentaient pas, et je ne pouvais le partager avec personne d’autres que lui. Mais il ne parlait déjà plus depuis plusieurs heures. Outre mon ordinateur portable, habitué de recevoir mes doléances écrites sans mot dire, et le personnel infirmier dévoué et peu bavard, le silence ne fut brisé qu’à quelques reprises, et à chaque fois, les phrases terminaient leur course sous mes paupières détrempées.

Il n’est pas aisé de connaitre nos réactions suite à la mort d’un père, et le deuil a besoin de temps pour tracer sa route. Deux années peuvent paraitre pour certains une durée raisonnable, mais le deuil dépasse le niveau de la simple raison. Voilà, il y a déjà deux ans s’éteignait Lauréat Bérubé, c’était mon père, le seul que j’avais, celui que j’ai vu vivre et mourir dans la dignité et la simplicité.

Apprendre un peu la mort

21/12/2013

 
Photo
Je n’ai pas résisté encore cet hiver à mouiller mon soulier dans la froideur blanche du cimetière, cherchant peut-être d’autres traces que les miennes, que les siennes même, me demandant toujours pourquoi cet endroit est laissé à l’abandon en cette période de l’année. L’ensevelissement des pierres tombales mourant sous les froides neiges matanaises, fouettées par les grands vents d’hiver et bercées par les cloches incessantes d’une école bruyante et d’un croisement de routes impudiques et indécentes, me donne froid dans le dos à chaque visite !

 Je me suis assis sur le marbre, ou était-ce de la pierre, je ne sais trop, seul comme je l’étais derrière mon volant après quelque quatre heures de route, comme si je me reposais sur lui. Aucune communication possible, la barrière du décès m’en empêche, il va sans le dire ! Aucun lien direct avec Papa, mais beaucoup avec mes propres pensées, avec les dernières paroles échangées avant que la dose des médicaments ne soit augmentée pour contrer les douleurs, les attaques de la maladie, et que ne vienne le silence total.

Lui qui avait tant parlé dans sa vie, il est parti dans un vendredi de silence. Et assis sur cette pierre au-dessus de son corps inerte, les deux pieds dans la neige, je ne vois que d’autres pierres tombales qui souffrent silencieusement, comme lui lors de son départ, sans espoir de visiteurs …

La mort est une triste fin de la vie. Il n’y a pas de mort joyeuse, quoique l’on en dise … 

Je quitte la position assise, le postérieur un peu engourdi. Je regarde mes souliers, chaussures inappropriées pour protéger mes pieds contre cette couche de neige déjà au sol, mais très confortable pour la conduite automobile. Un chien noir me rejoint, « un chien fou », aurait certainement dit Papa. Une grosse bête trop joyeuse pour l’endroit. Il semble un peu perdu, nous sommes deux … je l’éloigne sans m’éloigner, tournant légèrement le dos au vent, je garde mes dernières pensées pour mon père. Je les tairai ici, vous me comprendrez …

Avec la perte de mon père, j’ai un peu appris la mort … Auparavant, je croyais que la mort survenait au bout de la vie. Je sais maintenant qu’elle arrive à bout de n’importe quelle vie !

Deuil complexe

21/6/2013

 
Photo
Encore ce soir, seul devant cet écran au clavier qui a senti naitre tant de mes textes, je pleure doucement mon père, à une semaine de ce qui aurait été son quatrième-vingt-sixième anniversaire de naissance.

Je suis tombé sur quelques notes écrites peu avant son décès où je racontais les derniers échanges que j’avais eus avec lui. Je me souviens avoir eu de la difficulté à terminer ma rédaction, non pas qu’il m’était ardu de rédiger mon texte, les mots naissent sous mes doigts assez naturellement normalement, mais le problème est souvent localisé au niveau de l’organe qui lit qui se mouille plus vite que la main qui écrit. C’est surement une des raisons pour laquelle je préfère m’adonner à l’écriture en solitaire …

J’avoue que le deuil est difficile et que la boucle ne se ferme pas facilement, et je ne sais pas trop pourquoi. J’ai été bousculé, certes, par les derniers mois de la vie de mon père et par les moments « sans  filet » que nous avons passés ensemble. Nos discussions ont été marquantes pour moi, et la digestion de certaines parties de celles-ci se fait assez péniblement, je l’avoue.

Je l’ai déjà écrit sur ce blogue : « Nous étions à la fois si différents et si  semblables. Nous résidions, pour certains aspects de nos vies, à des années-lumière l’un de l’autre, sans aucun espoir de rapprochement, alors que nous marchions dans le même sentier, avec la même longueur de pas, pour certains autres aspects. », et nous avions à la fois la même insensible dureté et la même cruelle sensibilité. Je ne sais pas l’expliquer autrement que par ces contrastes …

Comme je ne crois pas qu’il faille parler aux disparus, avec égard à ceux qui sentent le besoin de le faire et par respect pour la mort elle-même, j’ai cessé de parler à mon père le jour de son décès. La communication s’est éteinte avec lui. Ce qui ne signifie pas que son souvenir ne traine pas dans mes pensées, loin de là. J’ai apprivoisé la mort avec lui, d’aussi près que j’étais capable de le faire, et j’ai vécu des moments extrêmement précieux, durs mais précieux, que bien des fils qui ont perdu leur père subitement pourraient m’envier. J’ai eu, et j’ai pris, cette chance qui m’était offerte de vivre une différence entre un père et un fils, et je dois maintenant en assumer les conséquences.

Oui, ce soir encore, en écrivant ces quelques mots, je pleure mon père doucement et en silence, seul … ayant essayé honnêtement de fermer les livres avec lui avant le grand départ en mettant en relief, aussi avec lui, ce que nous pouvions débiter et créditer au regard de chacune de nos propres vies. C’est peut-être ce qui rend le deuil si complexe maintenant …

P.S. Bientôt un an … Papa est décédé au matin du vendredi 13 juillet 2012, alors que je sentais son pouls quitter lentement sa veine de vie. Il était 6h35 … Écrit le jour même, sur la route du retour : Il est parti

7 secondes

1/5/2013

 
Photo
Afghanistan. Cliquez sur la photo pour voir le vidéo
Je me suis réveillé ce matin avec les yeux salins et humides, avec des images vidéos de mon père dans les yeux, du cristallin de l’œil jusqu’à la cornée. Le chat, qui s’amusait de ce pied qui s’était évadé de la couette pendant mon sommeil, m’invitait à lui procurer quelques attentions de reconnaissance avant de recouvrir mes yeux d’une vision extranaturelle à foyers multiples. Je fis plutôt usage de mes mains pour d’abord frotter mes yeux soigneusement, prenant soin d’eux comme la prunelle de mes yeux, bien entendu… et j’enfilais sur mes oreilles, habituées à les supporter, les branches au bout desquelles les verres se tiennent en parfaite position pour combattre tous les maux qui affublent ma faible vue.

Cet ajout externe ne modifia en rien l’afflux d’images venues de l’intérieur, celles que la nuit semblait avoir fait tourner en boucle sur la rétine mémorielle de mes yeux dormants. Chacune des strates, chaque couche de la membrane de ma rétine paraissait encore imprimée de photos de moments vécus en compagnie de mon père. Je me plais à croire que cela fait partie du long processus de deuil nécessaire suite au décès d’une personne qui nous a marqué de près. Du reste, rares sont les journées où il n’y a pas un peu de mon père qui me passe par l’esprit. 

Nous étions à la fois si différents et si semblables. Nous résidions, pour certains aspects de nos vies, à des années-lumière l’un de l’autre, sans aucun espoir de rapprochement, alors que nous marchions dans le même sentier, avec la même longueur de pas, pour certains autres aspects. Depuis son décès, en vérité le déclenchement s’est produit peu après l’annonce de son cancer, j’ai amorcé une réflexion sur ma relation avec mon père, sur le fils que j’étais et, de ce fait, sur le père que je voulais être pour mes propres enfants, et de là, le grand-père pour les leurs. Il y a de quoi réfléchir pour une vie, vous m’direz… 


… . . .  .  . .   .   .   .    .    .    .      .    .     .       .      .       .        .       .        .          .         .        .          .           .          .

Mon chat roucoule comme un pigeon en attendant la bouilloire, car il sait que la prochaine étape sera la préparation de mon café-filtre et le blanchiment de celui-ci par un p’tit nuage de lait et que, s’il insiste, il pourra peut-être obtenir sa part (en passant, c’est un mythe que de penser que le lait est mauvais pour les chats !). Dès que le filtre commence à laisser passer l’eau bouillie à travers le café, l’odeur se répand dans la cuisine, et le chat, qui est en fait une chatte, et qui, de surcroit, se nomme Moka, redouble d’ardeur en miaulant et se frottant à mes jambes pour réclamer son blanc nectar. Je me résigne à lui verser une toute petite portion de lait en admirant sa patience indéfectible pour arriver à ses fins.

Cette parenthèse importante du matin, nécessaire à la santé spirituelle, me ramène à l’analyse des images imprimées sur les strates de ma rétine. J’y vois, si je puis dire, l’influence d’une femme qui, peut-être sans le savoir, sans en être véritablement consciente, quoique j’en doute, m’a beaucoup aidé, guidé, dans le chemin de ma réflexion à propos de mon père. C’est une marraine d’une grande humanité, une femme que j’aime profondément pour sa ferme douceur et son jugement en constante ébullition. Elle peut être aussi fraiche qu’une première neige, aussi douce qu’une pluie matinale d’été pour discuter de sujets difficiles et complexes, sans jamais imposer ses propres idées, sans jamais blesser, et portant les mots plus loin que les simples choses du quotidien mais en gardant toujours à l’esprit la simplicité même du quotidien. C’est une oreille attentive qui sait donner son avis, et c'est une parole sage qui sait écouter celle des autres. C’est une femme qui aime, qui donne, et sa beauté est comme un miroir qui nous fait voir les beaux reflets de notre propre personnalité. Tout le monde devrait avoir une telle marraine avec qui échanger lorsque le besoin se fait sentir.

Dans ces images que la nuit avaient calquées sur l’intérieur de mes yeux, comme pour diriger mon souvenir vers les bonnes conclusions, les bonnes prises de décision, Carmen occupait quelques « frames » sur le phénomène qui ressemble presque à de la persistance rétinienne. Certaines paroles sont à jamais gravées dans les sillons de mon disque d’archive et ma mémoire me les rejouent régulièrement, histoire de se les rappeler elle-même d’abord et de les mettre en pratique ensuite. Ce ne sont pas des avertissements, ni même des conseils, ce ne sont que des mots vivants qui sont issus de conversations qui semblaient anodines, dans l’auto, alors que nous bavardions, en route vers Matane entre autres… elles me reviennent souvent en tête, et me sont si utiles pour comprendre, saisir des situations que je n’avais pas bien analysées, pas bien décortiquées.

À tout dire, je préfère de loin me réveiller les yeux un peu dans l’eau, mouillés par les souvenirs, que de me coucher le cœur gros, mouillant mon oreiller de colère, de rage et de peur du lendemain. Plus je vieillis, moins je sais : ça, je l’ai appris ! Je sais qu’il faut savoir apprendre au moins une chose tout au long de sa vie et que le temps qui nous est imparti pour le faire n’est pas défini à l’avance : la mort, notre mort. Sujet difficile, s’il en est ! J’en parlais jusqu’à la fin avec mon père, et les phrases étaient plutôt courtes, saccadées, entrecoupées de mains essuyeuses, de marches autour du lit, et de lourds silences. Pour lui, le sujet n’était pas courant. L’est-il pour nous ? pour vous ? Parler de la mort ne tue personne …

S’il ne vous restait que 7 secondes à vivre, seriez-vous prêt ?

4 mois plus tard

20/11/2012

 
Photo
Papa, juillet 2012
J’étais assis à côté de lui, presque sur son lit, tenant sa main depuis longtemps déjà, en me disant que les mots ne pouvaient pas tout dire, que tous mes mots, tous ces mots que je prononçais depuis quelques heures déjà en m’essuyant l’œil de la main libre qui me restait, tous ces mots n’étaient peut-être que du vent pour me libérer, moi. Les entendaient-ils, lui qui, sa vie durant, en avaient tant prononcés, parfois en vain ?

Puis, je m’arrêtais, je me taisais, regardant le silence des mouvements inertes de son corps qui ne lui appartenait déjà plus, ce corps que les médicaments étaient en train d’assassiner lentement, puisque l’esprit le ferait de toute manière. Du reste, Maman et moi avions, dans la dernière journée de ses mouvements, si je puis dire, avions vu Papa tenté d’attraper une seconde réalité que lui seul pouvait toucher, une réalité que nous pouvions, de temps en temps, percevoir dans le bleu de ses yeux, j’allais dire dans la perte de ses yeux.

Pauvre Papa, toute une vie bien réelle ne suffisait pas à le tenir accroché au même niveau de réalité que nous. Maman et moi, avec un œil amusé et l’autre endolori, essayions tant bien que mal de nous tenir à mi-chemin entre ses deux réalités reliées par ce qui nous semblait être des cordes et des pièces de violon en cours de fabrication. 
 
Dans le cours de son lit, comme une rivière immobile sans courant, je voyais passer des ombres qui m’empêchaient de le rejoindre. Je savais que je marchais dans la vallée de sa dernière nuit, et qu’aucun mot ne sortirait plus de ce corps. Savait-il que j’étais là ?  Souffrait-il dans son corps, ou voguait-il déjà entre les eaux irréelles qui mènent au-delà de ce que nous connaissons ici ? Je suis incapable de le dire. Je ne pouvais que constater le léger changement qui s’opérait dans sa respiration, une respiration qui me gardait au calme, près de lui, dans une paix que seule l’approche de la mort attendue semble être capable de produire, me semble-t-il.

Photo
Maman - Octobre 2012
À intervalles réguliers, j’humectais ses lèvres et l’ensemble de sa bouche à l’aide d’un coton-tige et d’un liquide à la menthe, espérant que cela lui procurait quelques bienfaits, et je regardais le personnel infirmier lui administrer de nouvelles doses assassines (Je ne trouve pas d’autres mots. Je précise que le personnel du Centre Hospitalier de Matane, de même que celui du CLSC, a été absolument impeccable au niveau des services et des soins rendus, cela n’est pas et n’a jamais été remis en cause par personne. Leur dévouement a été à la hauteur des attentes, et même davantage. Ce que je dis, c’est que le cancer de la prostate à lui seul ne tue pas, les médecins aussi le disent. Il faut intervenir lorsque les douleurs deviennent insupportables.).

J’avais dit à Papa de ne pas partir sans me le dire, de m’attendre…nous en avions même presque ri tous les deux. Sans trop savoir pourquoi à l’époque, je ne voulais pas que mon père décède sans que je sois à son chevet, et surtout pas qu’il quitte tout seul. À son dernier souffle, alors que ses yeux étaient fermés depuis fort longtemps, ils se sont ouverts, tout de bleu vêtus, une ultime fois, avant que son regard ne s’éteigne à jamais.  Un dernier « P’pa » sorti de ma bouche, en essuyant mes joues d’émotions, regardant l’heure avec précision, j’ai pris un temps pour le regarder avant de fermer ses yeux : « Bon voyage, mon homme ! ». Et j’ai continué encore quelques instants à être le fils qui pleurait son père … avant de devenir orphelin.  Il me reste à faire mon deuil …
 
P.S. Pour ce qui est de Maman, elle se porte bien. Elle vit avec ma sœur Maryse qui est venue la retrouver à Matane, et elles préparent un déménagement prochain, mais sans se presser, au rythme doux de la vie heureuse …  Vous pouvez donc la rejoindre à la même adresse et au même numéro de téléphone qu’auparavant …

Matane - Après son départ

19/8/2012

 
Photo
C’est sous des cheveux plus courts que je reprends la plume de mon clavier aujourd’hui, après une trop courte visite à Matane, n’ayant même pas eu le temps de voir Lucille et Berthier (je vous verrai au prochain passage, c’est promis !).

Ma vengeresse et rougeoyante Dodge s’est à nouveau bien comportée sur la route, transportant même une passagère sur son siège avant droit pour cette descente éclair, puisque Nicole était du voyage. Elle s’est même permis d’ingurgiter à meilleur prix (la Dodge, pas l’épouse !) une essence à 3 sous de moins qu’à Québec en prenant quelques gorgées du précieux liquide dont elle a tant besoin à St-Fabien, d’autant plus qu’une fois sur place à Matane, l’Avenger a bien vu que toutes les pompes affichaient 1,42 cents le litre. Cherchez l’erreur !

Maman va bien. Nous sommes allés marcher au-dessus de Papa, essayant d’entendre quelques notes de ses mélodies venues d’ailleurs puisqu’un de ses violons a été déposé à ses côtés pour l’accompagner, mais nous pensons qu’il n’a pas eu le temps nécessaire pour compléter la fabrication de son archet !  

Les vêtements de Papa ont été distribués aux bonnes œuvres pour la plupart, aussi rapidement que grand-maman Phonsine l’avait fait lors du départ de grand-papa Louis en 1974. Telle mère, telle fille ! Une même vie de soumission, de simplicité et de grandeur d’âme.

L’atelier où plusieurs de ses violons ont été créés n’est plus qu’un ensemble de supports et de crochets bien disposés, prêts à recevoir d’autres outils. Les siens sont partis ailleurs, là où d’autres mains d’artisans pourront bien les utiliser et bien s’en servir. Ça m’a donné un choc, je dois dire, même si je savais que c’était comme ça, mais « the show must go on ! ». Maman non plus ne vit pas dans le passé, elle avance, ce qui ne signifie pas pour autant qu’elle efface tous les souvenirs qui l’ont portée jusque-là. Les souvenirs doivent être DEVANT nous, comme des phares, comme des modèles, comme des renouvèlements en perpétuel changement. 

Photo
Le décès d’un mari, d’un père, laisse des traces, c’est certain, malgré tout le temps que nous avons eu pour nous y préparer. Hier, autour de la table, avec Suzanne et Herman, Maman, Nicole et moi avons ressassé des souvenirs, des histoires que Papa « r’notaient » souvent, et nous avons ri, et parfois avec les yeux qui dégoulinaient (comme c’est le cas en écrivant ces quelques lignes !). Les larmes nourrissent les joues et les joies de notre présent…

Michel à Tonin est venu faire un p’tit tour chez Maman, animant encore davantage nos conversations, et au souper, alors que nous avions décidé de tenter notre chance au Coin d’Italie, nous avons pu, belle coïncidence, rencontrer Yvan et Christine, déjà attablés avec 2 de leurs filles, Isabelle et Myriam. Encore là, aucune difficulté à trouver des sujets de conversation, même que ce qui manque le plus ce ne sont pas les sujets, mais le temps pour les développer !

Retour à la maison familiale pour un café bien tassé, et quelques kilomètres sous les phares jusqu’à Québec sans même un arrêt pipi ! Prochaine étape : Maman devrait passer dans l’coin, on ira « r’virer » en Beauce pour une tournée générale de ces belles gens qui s’y trouvent !

Facebook - Élections - Maman

15/8/2012

 
Photo
Je m’ennuie de mon blogue par les temps qui courent, et des yeux qui, sans que je les vois, le lisent et m’observent … parce que, à travers les mots de mon blogue, à travers et au-dedans de ces mots, il y a moi, bien sûr. Mais devant les mots, c’est vous que je rencontre, c’est vous que je cherche, et que j’attends. Vous vous en doutiez, je présume …

Je m’ennuie de m’écrire, et de me savoir lu …pourtant, les sujets ne manquent pas, c’est le temps qui m’échappe et aussi, peut-être même davantage, le « trop personnel » que je n’ose vous dévoiler, que je protège encore … Il me semble vous en avoir déjà dit beaucoup, pour ceux dont les oreilles savent entendre entre les syllabes, pour les Renée, les Carmen, les Lise, les Carole, et les Diane de mon petit monde. Et mes études sont prenantes, que de lectures à traverser, que de bouquins à dévorer, à laisser suinter dans mes mémoires vives…


Photo
Derrière elle, c'est aussi elle, en plus jeune !
J’irai sans doute voir Maman au cours du weekend (j’aime bien ce mot que la langue française a accepté dans son vocabulaire, sans trait d’union). Depuis le départ de Papa, le vendredi 13 juillet, je n’ai pas mis l’œil à Matane. Nous en profiterons pour faire le tour de sa nouvelle réalité, simplement, en y ajoutant certainement une visite au cimetière pour se recueillir au-dessus du « repos » de Papa. Le vent du souvenir soufflera ses émotions sur nous, frisquet …

Maman va bien, je crois … quelle femme ! Je vous en donnerai des nouvelles à mon retour, sachant à l’avance qu’elle sera égale à elle-même, puisque le ciel n’est pas en mouvement, c’est la terre seule qui tourne!


Photo
Facebook a quitté ma vie depuis, euh…, depuis pas assez longtemps encore, et je m’en porte fort bien. Je retirais quelques avantages, je l’avoue, mais la somme des inconvénients était devenue trop lassante pour que je résiste à « tirer la chasse ». J’emploie cette expression sciemment parce qu’elle réfère à l’action que l’on pose avec une certaine évacuation, et Facebook avait cette odeur nauséabonde dans mon quotidien (je dirais même dans mon quotidien « de tous les jours ! » !). (Quelle ponctuation !!!)

Dans une grande majorité de cas, Facebook sert à commenter des choses inutiles du genre « Je suis heureux et je ne vois rien d’autres que le rose et la critique ne doit pas m’atteindre », ou à blaguer, ou encore à placer des photos de tout acabit. Et je vous fais « GRASSE » de la qualité du français !!! Tout de même, les remarques pointues de Roxane sur sa photo du jour me manquent … À quand le blogue, Rox ?

Quant à la notion d’amis sur Facebook, euh… faut-il que j’en rajoute une couche ? Ça va, tout le monde a compris la teneur de mon propos. Vous pouvez ne pas être d’accord, c’est là toute la grandeur et la décadence de la liberté, mais sur mon blogue, vous ne pouvez pas commenter sans que je l’approuve ! Essayez pour voir … 


Photo
Le 4 septembre s’en vient à grands pas, et je pense que plusieurs d’entre nous seront rivés devant leur petit écran (on devrait maintenant parler de grand écran, je pense !), vissés sur leur fauteuil, une main sur le café/bière/lait/jus/tisane/eau chaude ou froide, l’autre se  grattant le … derrière … de la tête, pour voir qui (dé)formera le prochain « gouarnement », pour savoir si les chefs seront élus dans leur circonscription (comté, ça fait vieillot !), et pour entendre quelqu’un, quelque part, annoncer que « si la tendance se maintient … ».

Bien malin qui peut prédire si Amir Khadir sera le prochain premier ministre ! 

Entéka, le mardi 4 septembre, notre vie basculera … et le lendemain matin, tout sera redevenu pareil ! On en reparle …

Euthanasie

19/7/2012

 
Euthanasie : le mot à lui seul en fait frémir plus d’un, comme la mort elle-même. Plusieurs la craignent, ils la craignent pour eux-mêmes mais aussi pour leurs proches, ils craignent même d’en parler, d’y penser, d’utiliser le mot, préférant utiliser des détours, des expressions poétiques pour la nommer, mais la mort nous atteindra tous, que l’on soit croyants ou non, et peu importe ce que en quoi nous croyons !

Et si la mort fait trembler, il est aisé de comprendre que des sujets comme l’euthanasie peuvent provoquer des débats houleux ! Même les dictionnaires n’arrivent pas à s’entendre tout à fait sur UNE définition unique !

Si nous décortiquons le mot euthanasie en tant que tel, pour découvrir sa racine grecque ancienne, vous serez étonnés d’apprendre qu’il se compose (ou décompose) de (ou en) deux mots : bonne et mort. Donc, à l’origine du mot, l’euthanasie désigne le fait d’avoir une mort douce, qu’elle soit naturelle ou provoquée, mais par NÉCESSAIREMENT provoquée ! 
 
Du reste, beaucoup de grands dictionnaires définissent l’euthanasie de cette manière, à peu de choses près; je vous invite à jeter un coup d’oeil à travers les pages du Trésor de la langue française, le Grand Robert de la langue française, et l’Encyclopédie Hachette Multimédia. Cette dernière, du reste, ajoute que le mot « a été créé par le philosophe anglais Francis Bacon, qui estimait que le rôle du médecin était non seulement de guérir, mais d'atténuer les souffrances liées à la maladie et, lorsque la guérison était impossible, de procurer au malade une « mort douce et paisible » ».

Quant à lui, le Petit Larousse 2007 se porte plutôt vers une définition légale en parlant de l’acte d’un médecin donnant la mort à un malade incurable, et en mentionnant que l’euthanasie est illégale dans la plupart des pays.

Dans son acceptation modernisée, toutes ces œuvres décrivent maintenant le phénomène, si je puis dire, comme ne pratique, que ce soit une action, voire une omission, qui a pour but de provoquer, particulièrement sous le contrôle d’un médecin ou directement par lui, le décès d’une personne atteinte d’une maladie incurable, dont la souffrance morale et / ou physique est devenue intolérable.

Bon, c’est ce que je voyais dans ma compréhension intellectuelle avant de sentir le pouls de Papa disparaitre au bout de mes deux doigts serrant son poignet vendredi dernier. Vous le savez, j’en ai assez parlé, Papa était rongé par le cancer de la prostate et le calcium de ses os servait de nourriture à la bête. Il était impossible, et ce dès le diagnostic en décembre 2010, de stopper le processus; les médecins n’ont pu que le ralentir pendant un temps pour lui donner un dernier bel été, celui de 2011, où il a pu revoir tout le monde, comme un dernier tour de manège !

Nous pensons, ceux qui l’ont suivi de près dans ses dernières semaines, Maman, pour qui le mot fidélité a certainement été inventé, ainsi que Suzanne et Herman, qui ont été d’une assiduité à ses côtés au cours du dernier mois de sa vie, nous pensons, donc, que les métastases avaient atteint la région de sa gorge et commençaient à s’attaquer au cerveau. Il éprouvait de jour en jour de la difficulté à avaler et les hallucinations (la deuxième réalité) ainsi que le sommeil soudain augmentaient leurs effets continuellement.

A-t-il été euthanasié ? Non, pas dans le sens populaire du terme … pas dans le sens où les rumeurs nous le laissent croire pour beaucoup de cas bien souvent, à tort à mon avis. J’ai souvent entendu des « coups d’vent à travers les branches » qui disaient des trucs du genre :« On a parlé au docteur, y a donné une dose plus forte, pis là, ça pas été long, y é parti … ». Je ne prête aucun fondement de vérité à de telles affirmations qui, selon moi, ne rendent personne intéressants !

Premièrement, il ne faut pas confondre médecins et assassins !

Deuxièmement, le mourant, le patient en phase terminale qui est hospitalisé, n’est plus nourri que par des médicaments pour lui enlever la douleur que le cancer provoque : de la morphine et ses dérivés, des produits pour empêcher l’agitation, et certains autres narcotiques de même acabit qui ne servent pas à prolonger sa vie, mais à calmer sa douleur. La famille, constamment à ses côtés, peut demander des doses additionnelles si elle se rend compte que le patient présente des signes de souffrance, car celui-ci ne peut plus parler ou appeler les services pour  l’aider.

Enfin, petit à petit, puisqu’il ne mange plus, puisqu’il ne boit plus, puisqu’il reçoit des injections de produits puissants auxquels son corps s’habitue (ce sont des narcotiques, et le corps en exige de plus en plus pour couvrir la douleur qui, elle, devient plus virulente !), le patient finit par pratiquement mourir … de faim !

Et il n’y a pas d’autres choix : la mort en quelques jours de cette façon, ou à moyen terme, avec des douleurs insoutenables pour le patient.

Alors, que doit-on penser de l’euthanasie moderne ? Que puis-je penser de l’euthanasie ?
Photo
Quand vous aurez dans votre main droite un bâtonnet avec un bout enrobé d’une éponge que vous aurez préalablement plongée dans une liquide mentholé pour humecter les lèvres crevassées, la langue sèche et dure ainsi que l’intérieur de la bouche de votre père, et que de l’autre main, vous serrerez son poignet pour savoir si son pouls est encore présent, en essayant de regarder à travers vos larmes pour voir si celui-ci est encore en mesure de vous faire un dernier signe avant de partir pour les grandes routes, eh! bien, après une nuit dans cette position, vous viendrez vider une bonne bouteille avec moi pour en parler …

P.S. Merci à tous pour les marques de sympathie témoignées en faveur de ma mère et de notre famille, pour votre respect renouvelé et pour votre soutien accordé. Il est des temps où le besoin de sentir la chaleur n’est plus simplement une question de température …

Il est parti ...

13/7/2012

 
6h35 ce matin, vendredi 13 juillet, ses yeux se sont ouverts une dernière fois. Il a serré longtemps les dents, et lâchant doucement un dernier souffle pendant que sa main serrait encore la mienne qui se dégageait lentement pour ne pas rester à jamais prisonnière, je sentais les derniers battements de son cœur quitter son poignet.

Je me suis entendu lui dire un dernier « P’pa » avant de lui refermer les yeux comme pour mieux le laisser entreprendre son périple en lui disant : « Bon voyage, mon homme ! ».

Toute la nuit, je lui avais demandé de ne plus se battre et de prendre la route, lui réitérant mon impuissance à le garder avec nous et mon manque de moyens pour l’aider à quitter ce corps devenu encombrant. Je lui disais, presque sans voix : « On est tout seuls ici, P’pa. Pis je sais pas quoi faire ! D’habitude, c’est toi qui m’aide ! Pas l’contraire ! »

De temps en temps, Papa me serrait la main, semblant comprendre mon chagrin, et entendre ma complainte aussi bien que vous pouvez la lire maintenant. Mais tout comme maintenant, le seul bruit qui me revenait, c’était celui de mes propres sanglots …

La nuit a été épuisante, il ne devrait pas être permis de mourir devant son fils ! 

Papa nous a quittés, il a vécu sa maladie d’une manière simple et digne, je peux vous le dire. 

Requiescat in pace !

Lauréat Bérubé 28 juin 1927 – 13 juillet 2012

En veille

13/7/2012

 
(Dans la nuit de jeudi à vendredi, au Centre Hospitalier de Matane, chambre 4118)

Le souffle est rapide, haletant … il y a encore une vie qui circule dans les veines de ce corps qui semble se battre contre un mal intérieur, un mal dont les douleurs sont grandement atténuées par une forte et puissante médication. 

La vie ne persistera certes pas longtemps, c’est certain, à l’intérieur de ce corps qu’habitait mon Papa voilà encore quelques jours, puisqu’il n’est nourrit que de médicaments maintenant; plus de nourriture, ni solide, ni liquide, que des injections de toutes sortes pour calmer douleurs et agitations … pour que la vie le quitte paisiblement, pour qu’il prenne les routes de l’ailleurs qu’il aura choisi de croire de son vivant.

La journée du vendredi 13 juillet vient d’ouvrir sa nuit depuis quelques minutes, un vendredi 13 qui pourrait manquer la fin, nous le savons tous … Je suis seul à ses côtés, veillant son sommeil, humectant de temps à autres ses lèvres et sa langue à l’aide d’un bâtonnet spécialement dédié à cet usage, tentant de lire les moindres signes de douleur sur son visage pour pouvoir y remédier.

Autant il parlait abondamment hier, autant son silence est lourd aujourd’hui. Mais sa parole d’hier (mercredi), surtout en après-midi, m’était presqu’insoutenable; elle était accompagnée de gestes et de manipulations imaginaires, et de propos souventefois difficiles à déchiffrer. Maman et moi devions parfois nous consulter pour y trouver quelques sens. En  soirée, les hallucinations ont continué de plus belle.

Et ce matin (jeudi), le flot de paroles s’était éteint, et la flamme ne s’allumera plus ! Tout comme les cordes de son violon voilà quelques semaines, ses cordes vocales ont pris congé de nous … et le reflet de ses yeux bleus ne nous est plus qu’un souvenir !

Papa laisse couler en ce moment les derniers grains du sablier des quatre-vingt-cinq ans de sa vie bien remplie … 
 
C’est mon père, et je suis fier de lui ! 

Dernière page du livre

11/7/2012

 
 Bonjour à tous.

Je voudrais vous aviser que Papa est entré au Centre Hospitalier de Matane mardi en fin d’après-midi. Son état a continué de se détériorer progressivement dans les dernières semaines et maintenant il est devenu impossible de le garder à la maison; il ne marche plus, n’a pratiquement plus d’appétit et commence à ressentir des malaises qui demandent des soins plus spécialisés. 

Les deux ou trois derniers jours ont été particulièrement marquants dans la détérioration de sa situation, au point où il est devenu difficile de maintenir une conversation normale avec Papa. Nous croyons sincèrement que la dernière page du livre est en train de se tourner, et que la délivrance est proche pour lui.

Nous ne pouvons que lui souhaiter le moins de souffrances possible …

Que retenir ?

9/7/2012

 
(Samedi soir, 7 juillet, à Matane …)

« Que me faudra-t-il retenir, P’pa, des quatre-vingt-cinq ans de ta vie ? » 

« Que voudrais-tu que je retienne de toi ? »

Ma question ne semble pas le surprendre outre-mesure, et je ne m’en étonne pas non plus … Depuis qu’il ne quitte plus son lit, comme une douce rivière qui coule calmement vers son grand fleuve, imperturbable, nous abordons régulièrement tous les deux ce genre de sujets. Parfois ses réponses sont évasives, voire troublées, et derrière le grand bleu de ses yeux, je ne peux voir qu’une eau translucide vidée de son propre sens, comme la rivière qui ne veut pas rejeter le corps qu’elle vient d’engloutir pendant que tous le recherchent. 

Mais ce soir, sa main devenue osseuse, une main à la peau qui semble si mince que je peux presque y voir passer les globules blancs dans ses veines, ce soir, sa main tient la mienne, comme un père tient celle de son fils au moment de l’enfance. Mais on ne sait plus dire vraiment qui tient qui … 

Alors que le silence glisse entre nous depuis quelques instants, lui, les yeux mi-clos sous les couvertures de son lit, et moi, inconfortablement assis sur un tabouret à son chevet, mon père amorce une réponse, d’une voix presqu’éteinte mais qui demeure la sienne, en cherchant sa serviette de l’autre  main, distraitement, pour cacher le coin de son œil qui suinte.

Il est hésitant, désarçonné il me semble, ses mots n’ont pas de structures particulières et il se cherche une direction à prendre, ou bien il essaie la voie d’évitement, comme il sait si bien le faire et comme il me l’a appris involontairement (n’apprend-on pas par l’exemple ?) … et puis, il s’arrête, sec ! Se retournant vers toi, pour la première fois depuis l’énoncé de mes questions, je n’ai plus besoin de deviner le beau bleu de ses yeux qu’il essuie d’un geste qui lui est coutumier lorsqu’il ne porte pas ses verres.

Et là, d’un trait qui durera de belles minutes, de grandes minutes où un fils, même à l’âge où je suis arrivé, n’a d’autres choix que de mettre tous ses efforts pour garder ses yeux bien au sec et sa gorge relâchée, écoute presque sans respirer, il me confia ce qui, à ses yeux, fut la période la plus difficile dans sa vie … Et je pense que c’est ce qu’il voulait que je retienne de lui … pas nécessairement ce que TOUS retiendront, car là n’était pas le cœur de ma question…

Je connaissais déjà bien des détails de l’accident dont il me parle, son bras écrasé par une benne de camion, mais je n’en savais que la version du conteur en famille, pas celle du cœur, celle qui avait touché l’homme qui débutait sa famille avec sa femme et un enfant de 6 mois, un deuxième et un troisième qui allaient suivre peu de temps après sans que le travail ne vienne. Et je n’en connaissais pas la douleur qui avait touché l’homme dans sa chair et dans son orgueil.  

Sa main froide dans la mienne m’a semblé réchauffée lorsqu’un visiteur a interrompu son court monologue en entrant dans la chambre… En me penchant légèrement vers lui, j’ai soufflé à son oreille :« Je vais m’en souvenir, P’pa ! »

À la maison

2/7/2012

 
PhotoHerman, Papa et Suzanne
(Matane, samedi 30 juin)

Il était fatigué, épuisé, après sa visite chez le médecin qui s’est, dans les faits, déroulé à l’urgence du Centre Hospitalier de Matane, étant donné que le docteur Sylvain était de garde aujourd’hui et que ce dernier souhaite maintenant voir Papa toutes les deux semaines coute que coute…Fatigué, vidé, mais avec un stress de moins sur ses épaules, j’en suis absolument certain !

Il a dormi comme un enfant tout l’après-midi du sommeil du juste après cette visite plus que positive, visite pendant laquelle le docteur ne lui a pas glissé un seul mot de la possibilité de se retrouver dans une chambre de soins palliatifs, bien au contraire !

Hier soir, tous les trois, Maman, Papa et moi en avons discuté sur le pied de son lit pour connaitre sa position et surtout pour lui dire que SA position serait celle que nous défendrions ! Et Maman a répété à plusieurs reprises qu’elle le garderait à la maison tant qu’elle pourrait !  Mais Papa n’était pas complètement rassuré, et ce midi, il était nerveux, plus nerveux, plus agité qu’à l’habitude avant la rencontre avec son médecin en qui il a entière confiance. 

Son médecin l’a trouvé pas mal, suggérant même une réduction de la prise de certains narcotiques, étant donné la disparition de certaines douleurs possiblement dues à un autre médicament dont l’effet semble bénéfique. Cette diminution a aussi pour but d’empêcher la création trop rapide de l’habitude, si je puis dire. Elle pourrait aussi aider à améliorer la qualité de son appétit alimentaire.

Sans affirmer que la phase descendante est terminée, il nous a semblé, autant à Maman et moi, qu’à Suzanne et Herman qui sont ici depuis un temps déjà, que Papa se stabilisait un peu. 

PhotoMaman
Tout comme le docteur Sylvain nous le mentionnait aujourd’hui, et ça n’est pas la première fois qu’il le souligne, le support de la famille, de sa femme et de ses enfants principalement, est primordial dans une telle situation; et je ne peux passer sous silence la présence douce, rassurante, généreuse, et soutenue de ma sœur Suzanne et de son conjoint Herman qui offrent à mes parents un soutien quotidien fort apprécié depuis une dizaine de jours.  
 
Donc, pour le moment, et tant qu’il sera possible de le maintenir ainsi, Papa restera à la maison, dans sa maison, et recevra ici tous les soins palliatifs dont il a besoin. Il en a décidé ainsi et Maman supporte cette décision pleinement. Quant à nous, les enfants, je pense, sans vouloir me faire le porte-parole de qui que ce soit, que nous nous devons de respecter cette décision, de l’appuyer dans la mesure de nos moyens et d’agir en conformité avec nos capacités et nos responsabilités. Et c’est la situation qui prévaut actuellement…


En poussant la chaise roulante, au sortir de l’hôpital, tapant doucement sur son épaule, l’œil prêt à pleuvoir, j’ai réitéré à Papa mon soutien par rapport à sa décision, soulignant ma fierté de sa belle tenue pendant la visite ….

85 ans ...

28/6/2012

 
À toutes les Louise, les Renée, les Carmen, les Richard, les Joëlle, les Daniel, les Suzanne, les Herman, les Lucie, les Yves, les Lorraine, les Berthier, les Lucille, les Jacques, les Kathy, les William, les Félix, et les autres prénoms de ce monde qui ont visité ou contacté Papa aujourd’hui pour souligner son quatre-vingt-cinquième anniversaire de naissance, un gros merci de la part de la seule Aline de son monde à lui dont je me fais ici le porte-parole.

Quel bonheur de se savoir entouré de cette manière, et de sentir le soutien de nos proches !

La situation, selon Maman et ma sœur Suzanne à qui je viens de parler par téléphone, et que je rejoindrai demain, est sensiblement la même depuis une semaine, peut-être avec une légère diminution de capacité pour Papa. Certaines nuits sont plus difficiles à passer, les médicaments provoquant certains effets secondaires qui lui font dire et voir des choses qu’il est le seul à saisir dans leur entièreté.

Nous maintenons une attention particulière autour de notre mère pour qu’elle vive le mieux possible ces évènements difficiles. Elle est consciente que le « sablier se vide » progressivement et vit cela avec la même simplicité qui a caractérisé l’ensemble de sa vie.

Je vous tiendrai au courant de la suite… en vous remerciant des mots d’encouragement reçus de multiples façons …

Le sablier se vide

25/6/2012

 
Le sablier se vide dans les grandes mains de la vie, et il ne reste plus à la médecine qu’à tenter de lui rendre la souffrance supportable.

Ceux qui l’entourent, et surtout celle qui l’accompagne depuis de nombreuses années, ne peuvent, en quelque sorte, que regarder à la délivrance de ce corps que le cancer ronge de l’intérieur, sachant que seule la mort pourra l’y amener.

Bien sûr, le climat est lourd et triste, comme à chaque départ, mais nous avons tout de même le privilège d’accompagnement, un privilège qui nous permet de partager des moments précieux, simples, humains, avant le grand saut …

Vous l’aurez compris dans mes derniers écrits, et dans ce petit préambule, Papa commence lentement mais surement sa sortie finale de la scène, quoique personne ne peut véritablement annoncer la date précise de sa dernière représentation. Cependant, depuis quelques semaines, ses forces s’amenuisent et les douleurs s’intensifient, et, conséquemment, avec l’augmentation de la médication pour calmer la souffrance, la somnolence augmente et le tient au lit la plupart du temps. 
 
Mes frères et sœurs se succèdent à la maison familiale, ainsi que d’autres visites de la parenté et des amis venus le visiter possiblement pour une dernière fois. Tous le font avec un grand respect de la situation.

La prochaine étape à venir, et il semble que c’est pour très bientôt, c’est l’hospitalisation.  Nous avons rencontré le médecin la semaine dernière, Papa, Maman et moi, et Papa semblait plutôt favorable à l’idée. Nous revoyons le médecin ce samedi, et une décision devrait être prise à ce moment-là.

Une chose est certaine, Maman ne restera pas seule pendant ces moments particulièrement pénibles. Jacques et Berthier demeurent à Matane, Suzanne est dans la région pour quelques temps, et je descends ce vendredi pour la rencontre avec le médecin, et j’entends demeurer à Matane aussi longtemps que nécessaire; les études peuvent m’attendre …

Papa aura 85 ans ce jeudi … Il est le plus âgé de la famille élargie des Côté ! La vie poursuivant son cours, notre Clémence donnera naissance à un poupon vers la fin janvier 2013. 

Histoires de fin de semaine dans l'Est

18/6/2012

 
C’est vrai que je vous en ai souvent parlé, régulièrement, j’en suis tout à fait conscient.  Je vous parlerai encore aujourd’hui de ce père qui est le mien, de ce Lauréat que la vie quitte goutte à goutte, inexorablement, et j’y mêlerai d’autres histoires de gens ordinaires et tout aussi merveilleux qui, dans le silence de leur quotidien, ont tout autant de choses à dire et à vivre, de ces personnes que je nommerai tantôt par leur prénom, tantôt par leur passion, mais que tous reconnaitront …

Ils m’ont permis d’être humain, d’être plus humain cette fin de semaine en me capturant d’un regard, en me saisissant habilement d’une poignée au coin d’une conversation impromptue, en me levant un coin de la couverture de leur rêverie, en m’aidant à partager avec eux un mot, une idée, un principe, sans crier victoire ni courber l’échine…

J’ai eu devant mes yeux de belles vies en fin de semaine, de tous âges, des vies aux coudées franches, parfois difficiles, parfois très difficiles, voire ardues, des vies qui remplissent les yeux d’eau en un clin d’œil…J’ai vu des vies au croisement d’une étape vers un nouveau moment, et d’autres vies que la mort avait déjà commencé à charmer, dont la médiation pour la convention finale était en amorce … et les deux serraient les gorges sans serrer les poings !
PhotoUn atelier ordonné mais maintenant délaissé ...
Quelques nouvelles de Papa 

Depuis un mois,  mon Papa a perdu des forces considérablement, et les douleurs causées par les métastases s’accentuent particulièrement aux jambes mais aussi à la hanche. Ainsi, médecin et infirmière ont dû augmenter les doses de médicaments. Ses  jambes le transportent avec de plus en plus de difficultés et l’aide de sa marchette est devenu indispensable. Du reste, il passe le plus clair de son temps au lit …

Il a pris la sage décision d’abandonner le privilège qu’il avait depuis plus de 65 ans, soit son permis de conduire, ça n’est pas peu dire ! Et de vendre son véhicule automobile ! Avis aux intéressés !

Il m’a semblé que sa vie commençait à quitter son corps, un peu comme l’électricité quitte un fil lorsqu’il n’est plus sous tension. Son violon ne résonne plus, sa main droite que dirigeait sa fameuse « patte de singe », comme il l’appelait lui-même, parlant de son bras accidenté, cette main n’a pas serré l’archet au cours de la fin de semaine, il ne s’est déplacé que d’une chambre à l’autre, ou que pour des besoins essentiels, et son appétit requiert beaucoup de patience pour qui veut le satisfaire, tellement il n’arrive pas à fixer son choix. Il mange peu, très peu …

Maman, fidèle compagne de voyage, essaie de lui éviter les derniers « nids de poule » de la route de la vie, si je puis dire, gérant tout à la fois, de la soupe aux pilules, en passant par tous les soins que nécessite son état, y compris l’écoute active et patiente de toutes ses doléances.

PhotoL'Auberge La Seigneurie à Matane
Rimouski

Et samedi, j’ai participé (un peu) au déménagement de la sœur de ma femme Nicole, Denise qui s’en vient rejoindre le reste de la famille Gauthier à Québec après avoir passé sa vie active à Rimouski.  Il y avait là une belle gang de déménageurs amateurs avec du cœur plein les mains ! Je suis arrivé plus tard que je l’avais prévu, vous comprendrez pourquoi dans le prochain chapitre, si vous avez la patience de me lire jusque-là (s.v.p. ne me lâchez pas en si bon chemin !), mais mes raisons ont semblé être acceptées. Ouf…

Alban, notre patriarche, responsable de la bonne conduite des opérations, attitré également à la conduite du camion, et grand spécialiste de la peinture d’appartements rapide et efficace (une main magique du pinceau au rouleau !), est le genre de dirigeant qui mène sans en avoir l’air; en fait, c’est plutôt nous qui nous appuyons sur lui pour obtenir une ligne bien droite, et les instructions sont toujours justes et collégiales (dans le sens de : partagées, pas dans le sens de cégépiennes qui seraient plus près de l’anarchie par les temps qui courent … entéka … passons !). 
 
Notre groupe de fourmis travailleuses qui tournaient autour de Denise, dont le puits des émotions arrivait à contenir l’eau qui voulait en déborder, était de grande qualité : Christiane, femme d’Alban, leur ainée Danielle, et Nicole. Une boite n’attendait pas l’autre, et le camion se remplissait rapidement. Mario, conjoint de Danielle, Alban et moi étions brillamment et techniquement dirigés par Stéphane, un ami de Denise, qui débordait d’énergie et d’expérience. 

Ce qui fait qu’en 2 deux temps, 3 mouvements, nous nous retrouvions assis devant une table de restaurant à discuter et à nous sustenter, pour nous séparer par la suite en deux groupes, les uns retournant vers Québec, alors que Nicole reprenaient la route avec moi vers Matane pour une p’tite soirée tranquille …

La Seigneurie

… à l’Auberge La Seigneurie à Matane, chez Marie-Ève et Benoit.

Marie-Ève, qui a soufflé quelques bougies additionnelles vendredi, était à Québec, mais Félix (mon neveu) et son beau-père, Benoit, nous  ont reçus à l’Auberge où nous avons dormi comme une reine et un roi, après une marche de souvenance dans les rues de notre ville natale.

Au p’tit déj, Benoit a eu la générosité de répondre amicalement à nos questions et nous avons appris quelques bribes sur les ambitieux projets qu’ils mènent tous les deux. Les gens de la région ainsi que la clientèle touristique répondent bien à l’offre unique et abordable de l’Auberge. Le décor est splendide, et la table est exceptionnelle. Le chef Benoit a roulé sa bosse jusqu’à Édimbourg en Écosse, et sa touche commence à exciter les palais les plus délicats. Quant au sens de l’initiative et de l’organisation de Marie-Ève, le cinquantième anniversaire de mariage de mes parents nous avait révélé une parcelle de son talent.

Bien du succès avec l’Auberge, et les projets connexes, c’est ce que je leur souhaite, et quand vous passez à Matane, laissez-vous tenter par leur carte et leur décor, vous serez agréablement surpris par la qualité des deux, et la chaleur de l’endroit. Une bonne soirée garantie !

PhotoM. Thériault et Papa
Ste-Paule

En coup d’vent, j’ai virevolté à Ste-Paule… Le premier visage que
j’y ai vu, c’était la belle Raymonde, qui est née quelques jours après que mes parents se soient mariés, et qui, donc, célèbrera son anniversaire de naissance ce jeudi 21. Quelques mots échangés, un sourire, quelques vœux, et j’entrais chez tante Carmen pour lui remettre des photos prises au lac Horace lors d’une visite précédente. 

J’étais pressé, presqu’en retard, je devais filer vers Rimouski, mais auparavant, il me restait encore deux arrêts …

Passant devant la maison où mes parents habitaient à ma naissance, la maison à François Lemieux, entre tante Carmen et Louis-Régis, je filais à tombeau ouvert, tout en respectant les limites de vitesse imposées par la loi du Ministère des Transports, plus un certain pourcentage de tolérance permis par la Sureté du Québec, pour arriver chez Johanne et Gilbert.

J’ai vu là quatre yeux brillants échappés d’un capteur de rêves, les pieds solidement campés dans le roc de leur réalisation faite de leurs mains, au bout de trois ans d’efforts soutenus. Nous aurions pu discuter pendant plusieurs heures tous les trois tellement les mots devenaient de la musique que nous jouions sur une même gamme; nous n’avons pas même pris le temps de nous assoir tellement nous nous sentions en accord et stable ! Mais le temps me pressait, il faudra se reprendre, c’est certain!

Ste-Irène

Là, définitivement, en traversant le tracé, je m’disais que le temps jouait contre moi, mais que je ne pouvais plus reculer : définitivement, je serais en retard à Rimouski, la question était de savoir si les autres le seraient aussi !

J’allais remettre une photo à ce beau M. Thériault que Papa et moi avions visité (cliquez ici pour revoir l’article sur ce blogue) en mars dernier : un passionné du bois, un luthier comme Papa, un homme envahi par l’arthrite au point où les doigts refusent de toucher le violon correctement. 94 ans, il dit souvent que Papa et lui se sont rencontrés trop tard !

Il était très peiné d’apprendre que l’état physique de Papa ne lui permettait plus de se déplacer pour venir le rencontrer. Il m’a montré ses violons en cours de réalisations, m’expliquant les erreurs à corriger, détails que je ne percevais pas du tout, et la gorge serrée, l’œil mouillé, nous nous sommes quittés… 

Malgré le temps qui me manquait, j’ai roulé doucement pendant quelques minutes, comme pour respirer cette forêt qu’il aimait tant et dont le bois des arbres devenaient des notes de musique entre les mains de ces deux hommes… 

Et encore …

J’ai eu le temps de voir Lucille et Berthier, le temps de quelques mots, mais n’ai pas pu admirer la nouvelle acquisition motorisée de Lise et Karl. J’ai entendu la voix de ma grande sœur Suzanne que je verrai peut-être cette semaine puisqu’elle devrait être là au moment où j’y retournerai pour le rendez-vous mensuel de mes parents chez le médecin ce jeudi.

Comme dit souvent Maman : « On prend ça une journée à la fois », mais une chose est claire, dans les dernières semaines, il y a moins de mercure dans l’thermomètre, et je ne parle pas de la température ! Mais il est encore branché sur le même réseau que nous … 

Noces de platane !

13/6/2012

 
Photo
Leur photo de noces, agrandie à leur 50e !
Voilà 61 ans aujourd’hui, Aline Côté et Lauréat Bérubé unissaient leurs vies, se promettant amour et fidélité jusqu’à la fin de leurs jours. Il me semble qu’on peut dire : « Promesse tenue ! ».

J’irai leur rendre visite ce vendredi, je pourrai donc vous donner quelques nouvelles fraiches à mon retour dimanche en fin de soirée. Étant très régulièrement en contact avec eux, entendant encore la voix de ma mère dans le combiné du téléphone, je peux vous dire que Papa passe beaucoup de temps au lit, la force de ses médicaments ayant été récemment augmentée pour lui éviter la douleur.

Évidemment, cela a pour effet d’engourdir la douleur, mais aussi, vous le comprendrez, de le rendre plus somnolent, moins éveillé, j’allais dire
de l’assommer. Malgré tout, la situation est encore tolérable grâce aux bons soins qu’il reçoit, mais je sais qu’il n’est pas toujours facile d’accepter que la route se termine, autant pour celui qui marchait que pour ceux qui le voient dépérir.

N’allez pas me prêter des intentions, surtout, qui ne sont pas miennes, mais pour ceux qui me connaissent, vous savez que je veux être capable jusqu’au bout d’appeler la mort par son nom, de la nommer comme il se doit, sans cachette, sans détours… C’est d’ailleurs une des raisons pour laquelle j’ai tant appris de mes parents depuis l’annonce de la découverte du cancer de mon père.

Ce que j’écris, ils le lisent, comme vous, mais ils le vivent aussi, dans leur chair, et dans leurs tripes. Pour moi, ils demeureront même après leur départ un solide exemple de grande simplicité profonde. Et la  moindre des choses qu’il me reste à faire, c’est bien de leur rendre hommage avec la même simplicité qui leur est si familière.

61 ans, peut-être pas un record, mais une bonne moyenne !!!


<<Précédent

    Auteur

    Marc Bérubé

    Picture

    Archives

    Novembre 2018
    Août 2018
    Juillet 2018
    Juin 2018
    Mai 2018
    Avril 2018
    Mars 2018
    Février 2018
    Janvier 2018
    Novembre 2017
    Octobre 2017
    Septembre 2017
    Août 2017
    Juillet 2017
    Juin 2017
    Mai 2017
    Avril 2017
    Mars 2017
    Février 2017
    Janvier 2017
    Décembre 2016
    Novembre 2016
    Septembre 2016
    Août 2016
    Juillet 2016
    Juin 2016
    Mai 2016
    Avril 2016
    Mars 2016
    Février 2016
    Janvier 2016
    Décembre 2015
    Novembre 2015
    Octobre 2015
    Septembre 2015
    Août 2015
    Juillet 2015
    Juin 2015
    Mai 2015
    Avril 2015
    Mars 2015
    Février 2015
    Janvier 2015
    Décembre 2014
    Novembre 2014
    Octobre 2014
    Septembre 2014
    Août 2014
    Juillet 2014
    Juin 2014
    Mai 2014
    Avril 2014
    Mars 2014
    Février 2014
    Janvier 2014
    Décembre 2013
    Novembre 2013
    Octobre 2013
    Septembre 2013
    Août 2013
    Juillet 2013
    Juin 2013
    Mai 2013
    Avril 2013
    Mars 2013
    Février 2013
    Janvier 2013
    Décembre 2012
    Novembre 2012
    Octobre 2012
    Septembre 2012
    Août 2012
    Juillet 2012
    Juin 2012
    Mai 2012
    Avril 2012
    Mars 2012
    Février 2012
    Janvier 2012
    Décembre 2011
    Novembre 2011
    Octobre 2011
    Septembre 2011
    Août 2011
    Juillet 2011
    Juin 2011
    Mai 2011

    Catégories

    Tout
    Absence
    Accidents
    Actualités
    Ajusto
    Alouettes
    Alzheimer
    Apple
    Armée
    Armes
    Assurance-emploi
    Assurances
    Aths
    Attawapiskat
    Aujourd'hui
    Bell
    Billet
    Bosnie
    Brutalité Policière
    Budget
    Canadiens
    Canicule
    Captagon
    Chats
    Chômage
    Chsld
    Cigarette
    Commission Charbonneau
    Communication
    Construction
    Corea
    Corruption
    Crosby
    Crtc
    Cyber-prédateurs
    Début
    Déménagement
    Depardieu
    Diplomatie
    Dsk
    Eau
    Eau-Vive
    Économie
    Égypte
    Élections
    Entreprise
    Espace
    Études
    Facebook
    Famille
    Fête Nationale
    Football
    Frais De Scolarité
    Fusillade Ste-Foy
    Garantie
    Garderie
    Gouverneure Générale
    Harper
    Historiette
    Hoax
    Hockey
    Hydro Québec
    Hydro-Québec
    Ibuprofène
    Impact
    Imposteur
    Indignés
    Informatique
    Insolite
    Internet
    Iphone
    Islande
    Jazz
    J'écris
    Journée De La Femme
    Khadafi
    Kinégraphe
    Kyoto
    Lac-Mégantic
    Lait
    Langue Française
    Lauréat
    Legault
    Lennon
    Lettres à Madeleine
    L'Homme Tard
    Loi 99
    Loi Anti-pourriel
    Londres
    Mahamadou
    Maires
    Malawi
    Mali
    Manifestation
    Marathon
    Mariage
    Mars
    Matane
    Météo
    Migrants
    Mistral
    Monnaie
    Moustaki
    Movember
    Municipal
    Musiciens
    Musique
    Nature
    Nez Rouge
    Niger
    Noël
    Nouvelle Orthographe
    Oniria
    Oslo
    Ours
    Paludisme
    Pats
    Permis De Conduire
    Pétrole
    Photos
    Plan Nord
    Poirier
    Politique
    Politique 101
    Pont Champlain
    Pont De Québec
    Pot
    Poutine
    Praha
    Prose
    Publicité
    Radio Canada
    Réchauffement
    Recherches
    Récits Augmentés
    Récits Augmentés
    Rimouski
    Rires
    Roche
    Rouge Et Or
    Rouge Fiction
    Royalisme
    Russie
    Santé
    Sarajevo
    Sécurité
    Services Informatiques
    Sharks
    Si...
    Soccer
    Souffleuse
    Souveraineté
    Spectacles
    Sports
    SRB
    Ste Paule
    St-Gabriel
    St-Nil
    Suicide
    Superbowl
    Syndicat
    Syrie
    Technologie
    Tempête
    Tennis
    Terrorisme
    Titans
    Tourisme
    Transport
    Trou Story
    Vélo
    Visite Royale
    Voitures
    Volcans
    Yougoslavie
    Zappa


Propulsé par Créez votre propre site Web unique avec des modèles personnalisables.